Jean d’Ormesson

Notre jeune homme – Éditorial

Par Étienne de Montety

François Mauriac racontait qu’à la mort de Proust, Barrès lui avait glissé : « C’était notre jeune homme. » C’est cette image d’éternelle jeunesse qui vient à l’esprit lorsque nous évoquons Jean d’Ormesson : une intelligence pétillante et toujours en alerte, une présence chaleureuse, une vivacité intacte à l’égard des gens et de l’actualité.

Au fil des ans, il était devenu pour des millions de Français, on allait écrire des millions de lecteurs, un ambassadeur de la littérature : il en parlait comme personne, donnant toujours l’impression de sortir d’une discussion avec La Fontaine ou d’un dîner chez son cher Chateaubriand. Ce qu’il aimait, il aimait le faire aimer.

Jean d’Ormesson incarnait Le Figaro : sa première contribution remontait à 1969. C’était au moment du départ du général de Gaulle. Jusqu’à l’élection d’Emmanuel Macron, il resta passionné par « le temps qui passe » pour reprendre l’intitulé de sa chronique légendaire du Figaro Magazine. Dans nos colonnes, il consacra des centaines d’éditoriaux à la vie politique française, aux voyages – l’Italie ! –, à la littérature, d’Aragon à Borges. Cet esprit universel et insatiable savait tout et parlait de tout avec érudition et gaieté.

C’est pourquoi, à l’heure de lui rendre hommage, nous avons eu envie de le retrouver et de le relire. De relire le récit d’une vie placée sous le signe du bonheur. De redécouvrir, comme s’ils avaient été écrits hier, les articles de grands écrivains le saluant, lui et ses romans. Mais aussi de nous replonger dans quelques-unes des plus belles, des plus fortes, des plus brillantes chroniques qu’il donna au Figaro pendant presque cinquante ans : il parle de la droite française, de la chute de Saigon, de Jean-Paul II. Et aussi de l’origine du monde, du mystère de la vie et de la mort, de Dieu.

Durant un demi-siècle, il a posé sur le monde un regard passionné, défendant des idées avec brio et élégance, cherchant toujours à comprendre avant de juger, et célébrant inlassablement une civilisation dont il était le brillant héritier. Jean d’Ormesson ou l’esprit français.

 

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Font: http://grand-angle.lefigaro.fr