On savait depuis un moment qu’il valait mieux être attentif à l’image que l’on donne de soi sur les réseaux sociaux. Surtout si l’on cherchait un travail. Il y avait intérêt à éviter de poster selfies et autres portraits dans des situations peu glorieuses. Désormais, il va falloir faire la même chose pour trouver une table au restaurant.
Des clients “castés”
À New York, certains établissements parmi les plus en vue de Manhattan auraient pris l’habitude de «googliser» les personnes qui appellent pour réserver, mais également de faire un tour sur Facebook et LinkedIn, voire «d’interroger» la carte de crédit avec laquelle celles-ci ont réservé pour examiner leurs habitudes de consommation. Les responsables de salle scrutent leur profil professionnel, leur look, leur réseau. C’est ainsi que l’on peut vite se retrouver près de la porte des toilettes ou tout simplement sans table si ledit profil ne convient pas à la personne chargée des réservations. On savait que les restaurants établissaient des castings pour leur personnel. À présent, c’est au tour du client de se voir «sélectionné» selon des critères précis.
Quand faudra-t-il envoyer un CV en bonne et due forme pour pouvoir dîner dans le restaurant de son choix ? On peut d’ores et déjà imaginer tous les petits métiers qui vont prospérer grâce à la restauration : l’écrivain de rue va se doubler d’un consultant en CV pour aider à donner le meilleur profil. «Diplômé HEC, directeur commercial, cherche deux réservations pour 21 heures.» Les enfants seront poussés pour être admis dans les bons lycées qui leur garantiront les bonnes filières pour décrocher une table étoilée. Et les chefs vont-ils s’adjoindre bientôt les services d’un «profiler» professionnel pour déterminer qui peut s’asseoir à leur table ? On peut aussi imaginer un nouveau débouché pour les petits génies des mathématiques. Au lieu de filer faire fortune dans la finance et les hedge funds, ceux qui aiment la bonne cuisine pourraient louer leurs services aux restaurants. Ils imagineront de nouveaux algorithmes déterminant le profil idéal de ceux qui auront le droit de se délester de quelques centaines – voire milliers – de dollars pour avoir le droit de goûter les plats de leur établissement favori.